Ce jugement confirme que la musique d’un jeu vidéo (ici un site de mini-jeux sur internet www.PRIZEE.COM ) doit être considérée comme une oeuvre à part entière et non comme un élément de l’oeuvre ludicielle. Ce faisant le TGI éloigne encore une fois le jeu vidéo du bénéfice du statut l’oeuvre collective, si pratique en théorie, et donc préféré par les studios français.
En réalité cette décision me semble bien différente de l’affaire CRYO si l’on veut bien entrer dans les faits. En effet, la mission confiée au salarié concernait le sound design. Il s’agit souvent d’une manoeuvre utilisée par les studios pour écarter le risque juridique de voir reconnaître une protection par le droit d’auteur au travail du musicien. En parlant de sound design, on parle en théorie d’une opération très technique visant à choisir des bruitages et les faire correspondre à certains moments du jeu. Et cela peut s’avérer tout à fait exact. Ce travail peut se trouver tellement intégré au jeu et dépendant de celui-ci, qu’il ne peut être considéré comme une oeuvre à part entière mais uniquement comme une partie d’un tout qui résulte surtout de certaines contraintes imposées par le reste de la production et qui ont deux effets principaux : 1/ mettre en doute l’originalité de la création; 2/ conforter le statut d’oeuvre collective.
Le Tribunal confirme d’ailleurs que le statut d’oeuvre collective n’est pas hors de portée lorsqu’il relève « que certains éléments penchent en faveur de la qualification d’œuvre collective au sens de l’article L 113-2 du code de la propriété intellectuelle puisque les œuvres musicales ont été divulguées sous le nom de la société Prizee, réalisées par un salarié et impliquent une contribution personnelle de chaque auteur. »
Cependant le Tribunal relève immédiatement ensuite que « l’ensemble des conditions de l’œuvre collective n’est pas réunie, en l’absence de la preuve d’instructions et alors que, contrairement à ce que soutient la société Prizee.com, la musique ne se fond pas dans l’ensemble que constitue le jeu vidéo, puisqu’on peut l’écouter sans jouer, ainsi que l’établit d’ailleurs la commercialisation par la société Prizee.com d’un CD contenant les créations musicales. ».
Par ailleurs le Tribunal reconnait clairement que le travail réalisé par le salarié est protégeable par le droit d’auteur. C’est l’occasion encore une fois de rappeler aux studios qu’il ne suffit pas de nier le caractère original et créatif pour écarter la protection dont jouit l’auteur de par la loi. Il s’agirait d’un voeu pieux.
via Le jeu vidéo à la recherche de sa stabilité juridique : le cas PRIZEE.COM « SADDE.COM.